Vous avez sans doute ressenti cette sensation familière : cette difficulté à passer à l’action, cette tendance à remettre au lendemain, à différer les tâches que vous savez pourtant être importantes. Notre modernité a nommé la chose. Il s’agit de la procrastination qui peut entraver notre élan vers nos objectifs, nous privant d'une réalité désirée. Mais que se cache-t-il derrière cette propension à remettre les choses à plus tard ? Comment pouvons-nous la comprendre et la surmonter ? Et si la procrastination était une opportunité pour changer de cap vers une vie plus épanouissante ?
Comprendre la procrastination
Emprunté du latin « procrastinatio », la procrastination est une tendance à remettre au lendemain, à différer les tâches que l'on devrait accomplir de suite. On sait ce qu’on doit faire, on sait qu’on doit le faire, mais on ne le fait pas immédiatement. Ceci peut toucher certains domaines (personnel, professionnel, couple,…), certaine tâches précises (travail, ménage, devoirs, rapport,…) ou avoir tendance à se généraliser dans notre vie.
Quelle différence avec la paresse ? Le paresseux ne veut rien faire et s’en satisfait, tandis que le procrastinateur voudrait faire quelque chose mais ne réussit pas à s'y contraindre. Notons que le terme procrastination apparaît au XVIe siècle et est très rare dans le langage courant avant le XIXe. Il reste d’ailleurs peu usité jusqu’aux années 1980 et subit une explosion d’usage depuis les années 2000. Voilà qui taquine la réflexion …
La procrastination s’accompagne souvent :
D’activités de détournement pour nous distraire et/ou nous détourner de la tâche à accomplir : ranger, laver, vérifier ses courriels, passer du temps avec quelqu’un, regarder un film, lire, naviguer sur Internet, dormir, manger, fumer, rêvasser, …
D’excuses pour éviter le sentiment de culpabilité et la mauvaise image de soi : fatigue, manque de moyens, de consignes, d’envie, de temps, …
Les identifier permet aussi de les éviter. C’est un bon début.
Evaluer les conséquences de l’ajournement
Tout le monde procrastine à un moment ou à un autre ! Sachons tout d’abord évaluer la sévérité du problème en fonction des conséquences qui découlent du non-respect de nos engagements. Identifier ces conséquences pour soi spécifiquement et en évaluer l’importance peut-être un un pas pour sortir de l’ajournement et se pousser à l’action.
Bien évidemment, la procrastination est encouragée par ses conséquences positives :
Le soulagement de l’inconfort associé à la tâche reportée,
Un sentiment positif d’avoir respecté ses règles malsaines et croyances limitantes,
Le plaisir et le bien-être que procurent les activités de détournement.
Mais les conséquences négatives de la procrastination sont aussi plus nombreuses et néfastes :
L’accumulation des tâches et actions à réaliser,
La multiplication d’échecs, de pertes, d’abandons qui nuisent à la réalisation de soi,
L’intensification de sentiments désagréables comme la culpabilité ou la honte,
Le renforcement d’une mauvaise estime de soi, d’une tendance à l’autocritique, à l’autodévaluation,
La conservation des règles malsaines et de croyances limitantes,
Le renforcement de l’aversion envers une tâche ou un objectif.
Choisir des solutions pratiques
Comment sortir de la procrastination ? L’important est de retenir que la procrastination n’est pas la paresse et que bien souvent il suffit d’enclencher l’action pour qu’elle se fasse. Tout moyen qui pousse à commencer est donc bienvenu. Il existe une multitude d'approches possibles pour ce faire, en voici 3 pour exemple :
La liste de tâches prioritaires : commencez chaque journée en dressant une liste des tâches à accomplir, en les classant par ordre de priorité. Choisissez une ou deux tâches les plus importantes et concentrez-vous sur leur réalisation avant de passer aux autres.
La technique de visualisation : prenez quelques instants pour visualiser votre succès après avoir accompli une tâche difficile ou repoussée. Imaginez-vous ressentir la satisfaction d'avoir terminé la tâche et les bénéfices que cela apportera à votre vie.
La technique Pomodoro : divisez votre temps de travail en intervalles de 25 minutes, suivis de courtes pauses. Pendant chaque intervalle, concentrez-vous sur une tâche spécifique sans vous laisser distraire. Il peut être plus facile de démarrer une tâche sachant qu’il y a un laps de temps défini et court pour s’y consacrer. De plus, le sentiment de réalisation après chaque intervalle de travail peut encourager à poursuivre la tâche plutôt que de la remettre à plus tard.
Explorer les dynamiques et les freins
La procrastination est souvent le symptôme de dynamiques internes complexes. Derrière le report des tâches se cachent fréquemment des peurs, des croyances limitantes ou des besoins non satisfaits, façonnés par des expériences passées ou des pressions sociales. Prendre conscience de ces dynamiques et ces freins peut être crucial pour surmonter la procrastination de manière durable.
Il est alors nécessaire d'identifier les pensées, émotions et réactions qui surgissent lorsque nous repoussons une tâche importante, puis de les analyser avec bienveillance et sans jugement pour mieux comprendre les schémas de comportement sous-jacents et remettre en question les croyances limitantes qui influencent nos actions.
En faire une opportunité
Il est aussi possible que la difficulté de passer à l'action soit le reflet d'un besoin de réflexion plus profonde, d'une (re)définition de nos objectifs de vie, de nos priorités, de ce qui fait sens. L’action n’est-elle pas portée par un désir et ce désir est-il vraiment au rendez-vous ? Parfois, nous avons besoin de prendre du recul pour évaluer où nous en sommes et où nous voulons aller. Le modèle d'Hudson nous montre par exemple qu'il y a un temps pour tout, y compris pour la réflexion ou l'action, et qu’à trop vite vouloir agir, nous en arrivons parfois à répéter inlassablement les mêmes fausses bonnes solutions. Il est important de reconnaître que le changement ne se produit pas toujours rapidement et qu'il peut nécessiter un processus de réflexion et de maturation. Prendre le temps de comprendre nos motivations et nos aspirations peut nous aider à établir des objectifs plus significatifs et durables. Et à reconnecter notre élan vital, nos aspirations profondes.
A ce tire, il nous semble important de rappeler l'éloge de la lenteur, comme le souligne Carl Honoré dans son ouvrage éponyme de 2004, qui nous semble plus que jamais d’actualité. II y explore la valeur de la lenteur dans un monde où la rapidité et l'efficacité sont souvent privilégiées. Ralentir ne signifie pas seulement prendre son temps, mais aussi adopter une approche plus réfléchie et plus attentive à la vie. En prenant le temps de savourer chaque moment et de se connecter avec soi-même et avec les autres, nous pouvons trouver un véritable épanouissement.
Alors, peut-être, la prochaine fois que vous vous sentirez tenté de procrastiner, considérez cela comme une opportunité. Prenez un moment pour ralentir et réfléchir à ce qui est vraiment important pour vous. Et si vous n’y arrivez pas seul, le coaching de vie peut vous y aider…
Steel, P. (2007). The nature of procrastination: A meta-analytic and theoretical review of quintessential self-regulatory failure. Psychological Bulletin, 133(1), 65–94.
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La procrastination : Définition et usage sur LaLangueFrancaise.com
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Cirillo, F. (2018). The Pomodoro Technique: The Acclaimed Time-Management System That Has Transformed How We Work. Random House Business.
Hudson, W. (1999). The adult years: Mastering the art of self-renewal. Jossey-Bass.
Honoré, C. (2005). Eloge de la lenteur. Ed. Marabout.
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